Paris s'éveille avec la gueule de bois

31 mars 2011

La Loppsi promulguée, alors qu'on espérait encore soulever des « erreurs matérielles » relevées dans le verdict du Conseil constitutionnel… Le même jour la loi Besson passait en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, et la loi sur les soins psychiatriques commençait son parcours.

C'est alors qu'explosait la centrale de Fukushima. Et que les révolutionnaires libyens s'enfuyaient ventre à terre vers Tobrouk, les forces kadhafistes ayant engagé leur reconquête éclair du territoire.

Depuis, tant d'eau aura coulé sous les ponts. Voilà que les aviations française, anglaise et américaine sont intervenues pour sauver Benghazi, ainsi qu'on y appelait ici même, dès le départ.

Nous avons pesté ensuite contre le scandale des palinodies, la comédie de la non-intervention qui se prolongeait étant de plus en plus insupportable à mesure que les forces kadhafistes avançaient.

La manifeste solidarité entre le gouvernement français et le boucher de Tripoli, affichée sans complexes avec le maintien comme ministre de Patrick Ollier, animateur des amitiés parlementaires franco-libyennes, alors même qu'un important remaniement ministériel voyait partir sa camarade Michèle Alliot-Marie, pour le motif même de son excessivement voyante compromission avec les dictatures françafricaines – et en particulier tunisienne.

La fréquentation de Ben Ali valait à Alliot-Marie d'être remerciée, alors même que son compagnon Partick Ollier ne se voyait même pas reprocher ses relations libyennes... Et ceci au moment où Kadhafi entreprenait la répression sauvage des protestations démocratiques dans son pays.

Nicolas Sakozy avait déjà signalé sa solidarité totale avec les dictateurs contestés, par exemple lorsqu'il avait envoyé un télégramme de sympathie à Hosni Moubarak à l'heure où celui-ci annonçait qu'il quittait le pouvoir.

Il y avait donc bien toutes les raisons de craindre que la France officielle ne souhaiterait d'aucune façon intervenir pour mettre un terme à la boucherie, et qu'au contraire, elle pouvait même voir celle-ci d'un bon œil dans la mesure où elle risquait bien de refroidir l'euphorie révolutionnaire qui circule dans le monde entier depuis la révolution de jasmin tunisienne.

Et voilà que, coup de théâtre, l'Élysée prend la tête d'une intervention au secours du peuple libyen, après avoir, dans un premier temps, traîné des pieds autant que faire se peut, et fait savoir que la France ne souhaitait pas intervenir, étant données les difficultés techniques d'une telle opération, et qu'il ne pouvait en être question d'ailleurs, du fait de l'opposition d'au moins deux membres permanents du Conseil de sécurité, la Russie et la Chine.

On pouvait toujours pester et dénoncer la mauvaise foi totale d'un tel point de vue et de telles prétendues analyses, rien n'y ferait, et on attendait la curée

Or non, il y a eu intervention et Benghazi a été sauvée – ainsi qu'on y appelait ici. Provisoirement ? C'est la question qu'on peut se poser après des semaines d'intervention mesurée, à moitié efficace, qui n'a aucunement détruit la capacité opérationnelle des mercenaires kadhafistes.

Il est à craindre que ne s'installe une situation merdique où la guéguerre soit perpétuelle.

L'opposition à une intervention efficace est assez largement partagée pour que l'on se contente de cette situation longtemps.

Qui en payera les frais, ce sont ceux qu'on appelle toujours, dans la presse française, significativement, les « rebelles » – soit les forces démocratiques insurgées. Eux payent de leur vie, tous les jours, des affrontements toujours inégaux avec des mercenaires, redoutables combattants, payés à prix d'or.

Mais de l'or, Khadafi en a tant qu'il peut entretenir cette guerre civile aussi longtemps qu'il le voudra.

Dans le tourbillon, entre Fukushima et Benghazi, sous le choc d'une Loppsi qu'on ne sera même pas parvenu à faire connaître largement, on se retrouve tout étourdi, comme ne sachant plus comment on s'appelle.

L'Islande semble avoir vu son processus constitutionnel stoppé.

L'Egypte est loin d'avoir vraiment chassé Moubarak.

Le mouvement anti-nucléaire peine encore à rassembler les foules.

Le soutien à la démocratie en Libye est qualifié tous les jours de colonialiste.

La Loppsi votée, tout le monde est rentré se coucher.

La loi sur les soins psychiatriques

Et les syriens se font massacrer sans qu'on ait la force de leur prêter un regard.

Il n'en reste pas moins qu'on traverse des jours bien intéressant, où tout semble pouvoir se rediscuter sur terre.

Mais force est de constater que le monde entier s'éveille, et que Paris peine à sortir de la nuit.

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