La Nuit rwandaise n°4

Bitin - 10/05/2010
Image:La Nuit rwandaise n°4

13 mai, jour du repentir
50 ans de néo-colonialisme

2010, 50 ans de néo-colonialisme.

La Nuit rwandaise, revue annuelle consacrée à l’implication
française dans le génocide des Tutsi, paraît cette année le
13 mai en mémoire des résistants de Bisesero, victimes
de la barbarie coloniale. Le 13 mai, jour du repentir.

On sait également de Roussin que le 13 avril 1994, alors que le
génocide était pleinement engagé, ce dont pouvait convenir
Mitterrand et Lanxade lors d’une semblable réunion de “conseil restreint,
le ministre de la coopération interviendra pour dire : “Nous sommes dans une situation où les comptes vont se régler sur place.” Cette
phrase horriblement glaçante, une semaine après le début du génocide,
“les comptes” avec “l’ennemi intérieur” tutsi se “réglaient”, en
effet, “sur place”

Un des trente-trois responsables politiques et militaires dénoncés
par le rapport Mucyo, le général Quesnot, déclarait dans
L’Express du 28 octobre 2009, qu’il souhaiterait pouvoir poursuivre
en diffamation les rapporteurs rwandais, mais en était empêché par
l’immunité diplomatique dont bénéficie un État étranger. C’est pour
ça que l’association France-Rwanda-Génocide, enquête, justice et réparations
a diffusé un communiqué réitérant les accusations contenues
dans le rapport Mucyo contre le chef d’état-major particulier de
François Mitterrand, considéré comme un des principaux responsables
de la politique génocidaire française. La Nuit rwandaise y souscrit
à son tour. Si le général Quesnot souhaitait réellement laver son
honneur, et ne procédait pas seulement par effet d’annonce, nous
nous offrons pour tout débat public, y compris judiciaire, qui puisse
être l’occasion d’examiner le plus complètement possible la réalité de
son action. De même pour tous les autres responsables dénoncés ici
comme dans les précédents numéros de La Nuit rwandaise.

En même temps que nous avons choisi de déplacer la date de parution
de notre revue annuelle du 7 avril, début du génocide, au 13
mai, date de son dernier grand massacre dans lequel l’armée française
porte une responsabilité décisive, nous proposions que ce 13 mai soit
à l’avenir, en France, le jour du repentir. De Renaud Girard, journaliste
au Figaro, à Nicolas Sarkozy, président de la République, nombreux
sont ceux qui ont entonné l’antienne inverse, qu’il y aurait
lieu de s’éloigner des chemins de ce qu’ils appellent “la repentance”,
proposant au peuple français de s’épargner toute réflexion critique
sur ses crimes. Reconnaissons que cet argument démagogique satisfait
en grande part le désir d’oublier, aussi profond que l’innocence
collective est relative.

Seize ans après, la question de l’ignorance du public n’est plus de
mise. Tous ont eu l’occasion d’entendre parler des accusations extrêmement
graves dont leur État fait l’objet. À ce jour, aucun parti politique,
aucun grand média, et bien peu de médias alternatifs ou d’associations
émanant de la société civile, auront assumé de demander
des comptes à l’État pour la monstruosité de sa politique rwandaise.

Mais, derrière le génocide des Tutsi, il y a de nombreux autres
crimes, plus anciens ou plus récents, qui ensanglantent et ruinent
tout l’espace colonial, pour lesquels l’État français n’a toujours pas eu
à répondre.

La marche des sans-papiers, de Paris à Nice, tout au long de ce
mois de mai 2010, pour dénoncer le sommet franco-africain prévu en
fin de mois pour célébrer le cinquantième anniversaire de la « décolonisation
 » est un geste héroïque dans un pays où l’inconscience de
l’énormité du crime néocolonial domine, au point où Jacques
Toubon, chargé de l’organiser, peut tranquillement appeler un tel
sommet « familial ».

La méconnaissance et l’indifférence de nos concitoyens obligent
à s’interroger. Comment un tel phénomène est-il possible ? Le
« contrôle des consciences », concept central de la science politicopolicière
moderne, atteint là un degré de performance inquiétant.
Pire que tout, il produit une véritable perte de conscience, et l’on
attend toujours la nécessaire prise de conscience.
Cela fait plus d’un demi-siècle de crimes continu – sous l’égide
de la dite Vème République, l’État néocolonial –, auxquels on aura
assisté sans réagir. Un demi-siècle de crimes sans une seule polémique
parlementaire. Aucun parti ne se hasarderait aux élections sur la
base d’un programme anti-colonial. Car le consensus muet autour de
l’ambition de « grandeur de la France » concerne non seulement
tous les partis, mais leurs publics.

De même, le budget militaire, aussi astronomique soit-il, passe
comme une lettre à la poste – certes de la plus discrète façon, en session
extraordinaire de juillet, telle la récente loi de programmation
militaire qui détermine les efforts que la collectivité devra consentir
dans ce domaine pour les cinq prochaines années, votée en juillet
2009. Non seulement on tolère ses crimes, mais personne n’oserait
contester l’existence dispendieuse de l’armée. Au contraire, les seules
critiques, virulentes, venant du Parti communiste, dénoncent le
fait qu’on amoindrisse les effectifs – mais non le budget, qui perdure
au même niveau, en dépit de cette réduction d’effectifs, les dépenses
en équipement atteignant un montant inégalé.

Nul n’oserait évoquer que de telles extravagances budgétaires se
produisent en pleine crise économique, alors même que l’État est
plus déficitaire que jamais – et que leur économie s’impose, indépendamment
de tout autre critère.

L’art de tourner autour de cette évidence budgétaire en dit long.
Si ce n’était tragique, c’en serait drôle, de voir le gouvernement grec,
par exemple, se débattre – et l’Europe incapable de lui porter
secours –, sans que le paramètre principal de cette crise soit jamais
dénoncé : les dépenses militaires grecques, par tête d’habitant,
sont… les plus élevées du monde ! Faut-il sourire quand on pense
qu’une telle folie doit être supportée par les citoyens grecs, en héritage
de l’affrontement séculaire avec la Sublime Porte – le monde
musulman, toujours incarné par la Turquie moderne… ?

496 pages • 15 euros

A partir du 13 mai, dans toutes les bonnes librairies, ou en commande sur le site de Lady Long Solo.

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 10/05/2010

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